Renawen se réveilla en sursaut. Encore ce cauchemar. Elle secoua la tête pour chasser les images de son esprit. Elle regarda autour d’elle pour vérifier où elle était. La veille, elle avait établi son camp au creux d’un bosquet. Les braises rougeoyaient encore dans le petit feu qu’elle avait allumé. Elle ramena les couvertures autour d’elle et soupira. Pain d’épices, un ours brun, montait la garde. Il se retourna vers elle et émit un léger grognement.


« Je vais bien, ne t’inquiète pas. », lui répondit-elle.


Elle raviva le feu et mit de l’eau à chauffer. La tasse fumante dans les mains, elle plongea dans ses pensées.


Elle avait quitté la Moria depuis plusieurs semaines déjà. Coriolan était sauf et il ne faisait aucun doute que tout se passerait bien avec Yualë. Renawen avait donc repris sa propre route, poursuivant son objectif personnel et secret : retrouver une trace, ne serait-ce qu’infime, du passage de deux hommes. Elle était certaine qu’ils voyageaient ensemble. Un Elfe et un Humain. Le premier était grand et fin, cheveux un peu longs et blancs, souriant, si charmant. Le second, cheveux bruns et courts, charismatique mais si triste. Ils avaient été aperçus aux frontières de l’Enedwaith, aussi Renawen tentait de retracer leur piste pour les retrouver. Se rapprochait-elle d’eux ou, au contraire, s’éloignait-elle ? Peut-être s’étaient-ils arrêtés eux aussi là où elle avait établi son camp pour la nuit. Peut-être qu’il regardait les étoiles, comme elle le faisait chaque nuit, en pensant à elle... Comment Camellya pouvait-elle supporter le poids de cette absence ? Pourquoi ne recevaient-elles aucunes nouvelles d’eux ?


La jeune femme n’avait parlé à personne de ses intentions. Elle aurait pu demander de l’aide mais elle s’y refusait. Camellya se doutait sûrement de son objectif, pourtant elle ne lui faisait aucun reproche. La capitaine avait, pour sa part, décidé d’attendre qu’ils se manifestent ou qu’ils reviennent. Elle disait qu’elle était confiante, cependant Rena la connaissait suffisamment pour savoir reconnaître les signes de son anxiété, ce poignet qu’elle frottait tout le temps, ces moments d’absence... Elle avait toujours eu une bonne descente côté boisson et, vu comme elle tenait l’alcool, Renawen était persuadée qu’elle ne buvait pas pour oublier. Au contraire, elle perpétuait un geste, un rituel qui la rapprochait de l’être absent. Sans pour autant le ramener... Et elle, qu’avait-elle pour tenir ? L’espoir, sans doute fou, de le retrouver et d’être à nouveau avec lui.


S’ils étaient en danger, Camellya le lui aurait dit. C’était déjà arrivé par le passé et elle l’avait ressenti tellement fort jusqu’au fond de son être qu’elle était partie sur le champ à sa rencontre et, même une fois, pour lui porter secours. De justesse. Renawen se demandait si elle était aussi douée de cette capacité. Leurs liens étaient-ils assez forts ? Elle se fit la réflexion que, contrairement à Camellya, elle n’avait aucun objet qui venait de lui. Elle n’avait que ses souvenirs. La tristesse s’empara de son coeur.


« Adian... », murmura-t-elle.


Et elle laissa les larmes rouler sur ses joues.