chap5.pngNulle part, malgré toutes mes recherches, je n'avais pas réussi à mettre la main sur Erelyd et personne ne semblait l'avoir vu dans les auberges les plus fréquentées des Terres du Milieu. Il ne me restait plus qu'à utiliser ma dernière carte : demander à Lya si elle savait où se cachait son père. Comme elle était persuadée que j'avais pour son frère plus que de l'affection, elle se ferait sans doute des idées sur mes intentions, mais ne poserait pas trop de questions. Tirant sur la bride de Menelyan, je changeai de direction pour retourner vers Bree.
La ville était aussi animée qu'à l'accoutumée, j'avais parfois la sensation que la proximité de la Comté contaminait cette région par sa bonne humeur et son insouciance. Menelyan faisant preuve de nervosité, j'empruntai les ruelles les moins agitées pour me rendre au Poney Fringant. Une fois sur place, j'installai mes chevaux au fond de l'étable où le bruit de la foule ne les dérangerait pas avant de me rendre à l'intérieur de l'auberge.
La chaleur ambiante était agréable, un groupe de musiciens échangeait des notes sur la petite scène qui ornait un coin de la salle et il régnait une bonne odeur de nourriture et de bière. Je me dirigeai aussitôt vers le tenancier.

- Bonsoir ma p'tite dame, qu'est-ce que ce sera pour vous ?
- Une chopine d'une de vos bières, n'importe laquelle accompagnée de votre plat du jour. Si vous pouviez regarder si vous avez reçu du courrier pour Yualë Elenarda cela m'arrangerait bien.

Il hocha la tête avant de donner quelques ordres et d'entreprendre de trier une pile de lettres posée dans un coin.

- Z'avez de la chance, elle est arrivée y a un moment, j'allais la jeter.
- Je vous remercie.
- Allez donc vous choisir une table, c'est fête aujourd'hui, y a même un Elfe qui doit venir jouer tout à l'heure, il paraît qu'il est connu d'où il vient.

Je hochai la tête et m'attablai près de la scène, plus préoccupée par la lettre qu'il m'avait tendue que par un prétendu ménestrel talentueux. Aussitôt installée, je décachetai l'enveloppe en ignorant la personne qui s'était occupée d'amener mon repas et ma boisson.


13 février XXX5

Dame Yualë,

Je vous remercie de votre courrier. J’apprécie votre attention.
Chacun d’entre nous a fort à faire. Aussi, ne vous embêtez pas à me prévenir de chacun de vos déplacements. Faites juste en sorte que l’on puisse vous joindre assez rapidement.
Je souhaite de tout cœur que vous réussissiez ce que vous entreprenez. Sachez que vous pouvez compter sur nous si vous avez besoin d’aide ou de compagnie.
Soyez certaine de mon amitié,

Dame Camellya

Malta a Miril


Malgré mon attention tout entière portée sur la missive, il m'était difficile d'ignorer l'Elfe qui s'était installé sur la chaise à côté de moi après avoir déposé ma commande. Je repliai le feuillet et entrepris de regarder l'importun d'un air mauvais. Celui-ci se contenta d'afficher un grand sourire lorsqu'il vit ma surprise.

- Tu ne t'attendais pas à me trouver là, Yualë ?
- Non. Pas vraiment. Que faites-vous ici Arkhel ?
- Je pourrais te retourner la question, mais je suis presque certain que tu me cherchais. Tu as dû voir les affiches un peu partout dans la ville et te dire que j'allais conter fleurette à toutes ces douces jeunes filles. Ta jalousie aura guidé tes pas vers moi.

Je retins un soupir. Arkhel était un Elfe adorable, mais il se méprenait complètement.

- Je suis venue ici récupérer mon courrier avant de repartir, mais vous pourrez peut-être m'aider.
- Tout ce que tu voudras. Mais avant, j'ai une question.
- Inutile de la poser, je sais ce que vous allez me demander. La réponse est non, mais je suis sur une piste.

Il était clairement visible que ma réponse le blessait.

- Je sais par contre que je suis tombée malade.. Peut-être en savez-vous plus que moi à ce propos ?

Il fit tourner son verre entre ses mains et garda le silence si longtemps que je finis par penser qu'il n'allait rien dire.

- Comment va ta main ?
- Fort bien.
- Tu mens.
- ..

Il emprisonna mes doigts glacés entre les siens.

- Je me sens responsable de ce qui s'est produit.
- Comment ça ?
- J'étais avec toi quand tu es tombée malade et je n'ai pas compris à quel point c'était grave.

Il commençait à m'intéresser.

- Reste là ce soir, je dois faire mon travail, je t'expliquerai plus tard.

Il lâcha ma main et disparu derrière la scène. Tout ceci me laissait une sensation de déjà vu assez désagréable.