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Si la Forêt d'Or avait été préservée durant autant d'années, ce n'était pas seulement car cette contrée était invisible à ceux qui ne savent pas où chercher. Même en connaissant les chemins et les fleuves menant à cette région paisible, tenter d'y pénétrer sans avoir la confiance du peuple qui y vit revenait à accepter de périr sous les flèches de leurs archers. Les Galadhrim étaient des Elfes pacifiques et doux, ils n'avaient pris les armes que pour deux raisons : La nécessité de protéger leur patrie des créatures parvenant à rejoindre la surface à travers la Moria et veiller à ce que rien n’arrive à leurs souverains.
Bien que mon passé m'ait amenée à porter mon épée et mon bouclier en tant que membre de la garde de la Dame, je n'étais plus qu'une inconnue depuis que j'étais partie, des années auparavant. Je me devais donc de faire mes preuves aux côtés d'Arlienon pour avoir une chance de rencontrer Dame Galadriel.
Les remèdes du maitre des runes avaient perdu de leur efficacité, je souffrais en silence et tentais de préserver mon bras comme je le pouvais. Mon compagnon de route n'était pas dupe, conscient que le temps nous manquait, il acceptait les missions les plus difficiles et me soutenait de son mieux par ses soins et ses attentions.

Arlienon trainait avec application un sac rempli de diverses babioles récupérées dans les campements orcs du nord de la Forêt d'Or. Nous y avions passé la journée et l'épuisement se faisait sentir au même titre que l'augmentation de bougonnement provenant de mon ami. J'avais déposé mon bouclier sur la toile brune ce qui ne faisait qu'exacerber son agacement.

- Franchement Yualë, si tu n'es pas capable de porter ton bouclier toute une journée, arrête et contente toi de m’attendre !
- Ce n'est pas une journée, c'est seulement le temps de retourner jusqu'à nos montures.
- Je t'ai déjà dit que tu ne devais pas te surmener.
- Ce à quoi je réponds que je ne peux pas non plus te laisser tout faire. Tu as besoin de moi face à ces lourdauds.
- Il suffirait que je fasse attention et..
- Ne discute pas. Je souhaite t'aider, à deux nous irons plus vite et nous manquons de temps. Mieux vaut forcer maintenant qu'une fois que j'aurai la peau verte.

Il se tût, notre dernière conversation à ce propos datait de plusieurs semaines, l'évoquer était comme rendre plus tangible la malédiction et en accélérer les effets. La vue de nos montures nous sorti de l'embarras. Menelyan piaffa d'impatience tandis que je m'occupai de fabriquer un travois de fortune à l'aide de deux longues perches et d'une corde. Arlienon s'occupa d'y déposer son fardeau et de le sangler tandis que j'approchai Fanyarë d'une grosse pierre afin de sauter plus facilement sur son dos. Mon ami arrêta un instant sa tâche pour regarder mon manège, je l'entendis adresser une prière à voix basse aux Valars.
Menelyan n'eut aucun mal à traîner le lourd chargement jusqu'aux Galadhrim qui nous avaient demandé de semer le trouble chez les orcs.

- Vous voilà de retour ? Nous pensions que vous en auriez pour quelques jours !
- Il faut croire que nous sommes efficaces.
- Ou que nous n'avons pas de temps à perdre.

Le mien était précieux et je commençai à en avoir assez de passer mes journées à ramasser des ordures, livrer des flèches, gratter des cailloux, chanter aux arbres ou voler leurs colliers aux gobelins. L'Elfe ne releva pas mon impolitesse et se contenta de nous remercier en nous offrant quelques feuilles d'or. Alors que nous allions repartir, il nous interpella.

- Attendez !

Arlienon se retourna et écouta poliment l'Elfe tandis que je m'occupai de désassembler le travois.

- Vous avez fait preuve d'un grand courage à plusieurs reprises et aidé nombre d'entre nous. Nous avons parlé de vous à la garde de la Dame, elle vous laissera passer si vous désirez vous rendre à Calas Galadhon.

Je tournai la tête, enfin nous allions avoir une chance de rencontrer Dame Galadriel !

- Savez-vous si le Seigneur et la Dame s'y trouvent actuellement ?
- Ils sont très occupés, mais seront présent à coup sûr lors du bal honorant la chute des premières feuilles.
- D'ici combien de temps aura-t-il lieu ?
- Dans exactement trois jours, vous aurez tout le loisir de découvrir le joyau de la Forêt d'Or d'ici là !

Je lui souris et le remerciai. Finalement ce n'était pas si mal de devoir effectuer ces tâches ingrates, au moins j'allais avoir une opportunité de discuter avec la Dame à propos de sa fameuse médication.