Nous avions décidé de rester quelques jours à Caras Galadhon pour nous reposer. Ou plutôt, j'appréhendais notre trajet dans la Moria et avais grand besoin de profiter des contrées lumineuses de la Lothlorien. Coriolan se moquait bien du lieu tant que nous étions ensemble. Il comprenait mon malaise et avait accepté de repousser notre départ, bien que lui appréciait le majestueux royaume des Nains.

Je passai ma tunique avec plaisir après cette période à porter des robes pour éviter de me faire remarquer au milieu des habitants de la ville. Coriolan était assis sur le lit de ma chambre, à ses côtés étaient déposés les sacs dans lesquels nous avions déjà rangés nos effets. Je récupérai mon épée accompagnée de son baudrier et me tournai vers lui en ajustant celui-ci, un sourire ravi aux lèvres.


- Cette allure me semble plus familière..

- Je détonne déjà bien assez dans le paysage pour en rajouter avec ma tenue.


Il me regarda. Il avait pu le constater par lui-même, ma peau bien plus sombre que celle des habitants de la grande cité et ma chevelure rappelant celle des Humains m'empêchaient de toute façon de passer inaperçue. En particulier lorsqu'il était à mes côtés. Alors que j'allais enfiler mes gants, il prit ma main et la porta à ses lèvres.


- Prête ?


Je récupérai mon sac et y déposai mes gants en souriant.


- En effet.


Je lui confiai mes affaires en descendant, le temps de payer ma note auprès de la tenancière. Je sortis ensuite de la petite auberge pour le rejoindre et restai interdite sur le pas de la porte. Coriolan étant bien là, accompagné de nos trois montures, mais il n'était pas seul. Galadriel se tenait à ses côtés, elle ne lui parlait pas et ne lui accordait pas même un regard, mais il ne semblait pas s’en soucier. Je fronçai les sourcils. Je me demandais ce qu'elle faisait là et avais bien du mal à contenir ma colère. Quelles qu'aient été ses intentions, elle nous avait faits souffrir tous les deux et je lui en voulais d'avoir refusé de m'écouter lorsque j'étais venue la voir au sujet de ma malédiction.


- Je constate que vous vous portez bien, Yualë.


Je m'inclinai devant elle, soutenant toutefois son regard.


- Je constate que vous ne semblez pas vous sentir coupable, Dame Galadriel.

- Pas le moins du monde. Je sens que vous m'en voulez cependant.

- Comment pourrait-il en être autrement ?


Elle tourna la tête vers Coriolan et sembla le jauger quelques instants avant de me sourire. Ce dernier restait de marbre, complètement indifférent à la Dame de la Forêt d’Or. J’avais envie de l’éloigner de lui et me contenais à grand peine.


- Vous n’avez pas perdu votre temps.

- Au lieu de tourner ainsi autour du pot, dites-moi plutôt ce que vous êtes venue faire ici, Dame.


Elle rit.


- Vous êtes moins patiente qu’il y a quelques années.

- Je n’ai peut-être plus envie d’attendre votre bon vouloir. Je n’ai plus les liens que j’avais avec vous et ne compte pas rester le temps que vous vous décidiez à parler.


Elle sembla prendre conscience que je ne plaisantais pas. Elle s’écarta de Coriolan pour s’approcher de moi.


- Je voulais seulement m’assurer que vous alliez bien et que vous n’auriez plus besoin de mon aide. Je ne pouvais pas vous laisser tenter de me convaincre, il ne vous restait que trop peu de temps. Vous avez fait partie de ceux qui ont protégé ce royaume, pour cela, j’ai préféré vous faire obéir une nouvelle fois pour vous offrir mon aide plutôt que de vous laisser disparaître pour préserver vos souvenirs.


Elle attrapa mon bras gauche et l’observa un moment avant de me conduire auprès de Coriolan. Celui-ci n’avait rien dit jusque là, il attendait visiblement de voir la tournure des événements pour intervenir au besoin. Il prit ma main dans la sienne et la serra doucement, ce qui me calma aussitôt.


- Je comprends mieux vos inquiétudes à présent.


Son discours, autant que la présence de Coriolan, me radoucirent.


- Je vous souhaite d’être heureux tous les deux. Quant à vous Yualë, vous reviendrez vers moi, vous verrez.


Je haussai les épaules, je savais qu’elle avait l’étrange capacité de voir l’avenir, mais cela m’importait peu. J’étais seulement préoccupée par ce qui se passerait dans les prochains jours et rester à Caras Galadhon était très loin de mes envies.

Galadriel fit un dernier geste à notre adresse avant de s’éloigner, retournant vers son cher jardin. Ce n’est qu’à ce moment-là que je remarquai la présence de plusieurs gardes, Elénd me fit un léger signe de tête avant de repartir à la suite de la Dame.

Coriolan me sortit de mes pensées en déposant un baiser sur ma joue.


- Ma dame est-elle prête ?

- Je pense.


Je haussai la voix.


- A moins bien sûr que quelqu’un n’ait encore quelque chose à dire ?


Le silence me répondit.


- Je crois que nous pouvons y aller.


Nous chevauchâmes sans être arrêtés jusqu’aux portes de la ville. J’étais un peu mélancolique à l’idée de quitter l’abri des arbres, mais je me sentais mieux. Je savais que je ne serai plus seule. Je fis trotter Menelyan pour me rapprocher de Coriolan afin de profiter de sa présence. J’avais envie de rentrer chez moi et de retrouver ceux que j’appréciais, mais bien plus que tout, je souhaitais rester à ses côtés.